Charlotte Isabel Hansen raconte l'histoire de Jarle Klepp, jeune étudiant en sciences littéraires, qui apprend qu'il est le père d'une petite fille, éponyme, de sept ans, conçue lors d'une beuverie alors qu'il avait dix sept ans.
Ce qui est totalement improbable, c'est que la mère Charlotte Isabel,
qui n'a jamais revu Jarle depuis cette fameuse soirée, décide un jour de partir en vacances pendant une semaine et envoie sa fille, par avion, chez son père, qui rappelons-le est quand même un inconnu (peut-être un psychopathe, un pervers ??) pour passer la semaine avec lui. Bref, l'histoire débute assez (très ?) maladroitement.
Qui plus est, on a droit à un portrait très désagréable
du personnage principal : Jarle est un étudiant imbu de lui-même et
égoïste, qui aime se penser supérieur aux autres, qui est obnubilé par
un article qu'il a envoyé dans une célèbre revue intellectuelle mais
qui n'est pas encore publié et qui évolue dans un monde universitaire très caricaturé, pédant et franchement pas sympathique.
Le début du roman est donc fortement pénalisé par l'incohérence de
l'histoire et le portrait du protagoniste, sans compter que certains
passages un peu crus, voire vulgaires, ne se justifient pas.
Mais, il
faut attendre que la petite fille fasse son apparition pour prendre
(enfin) goût à ce roman. Charlotte Isabel, dite Lotte, est une fillette blonde de sept ans tout à fait normale : elle est curieuse, très bavarde,
pose sans arrêt des questions sur le monde qui l'entoure et est
passionnée par les princesses et les Spice Girls. Rien de bien original, mais le portrait
reste charmant, mignon et on a vite fait de s'attacher à Lotte qui va
apporter la touche de fraîcheur et de vie dont avait bien besoin Jarle
et son entourage (et le roman aussi). On assiste à l'amour naissant d'un
père envers sa fille, un père, qui au début ne se reconnaît pas en tant que tel, mais qui va subir les premières inquiétudes, les premiers sentiments de
responsabilité, les premiers déboires du rôle de père. Certes, le sujet a
déjà été traité bien des fois, et de façon plus originale encore, mais
il en résulte ici un roman touchant, qui ne restera pas forcément dans
ma mémoire, mais je suis bien contente d'avoir dépassé les
premières pages un peu chaotiques pour aller jusqu'au bout !
Extraits :
Avant l'arrivée de Lotte :
La mère de mon enfant est tout bonnement caissière.
Et, à présent, elle est en vacances dans le sud.
Quelle attitude allait-il adopter vis-à-vis de cette situation ? En tant qu'étudiant des sciences littéraires, avec une représentation de soi comme membre du monde universitaire, il était difficile pour Jarle de se résigner au fait qu'il était "lié" à une caissière. Ne vous méprenez pas, se disait-il, comme s'il parlait à une tierce personne, je sais parfaitement qu'il faut que les gens travaillent dans le secteur alimentaire et, par définition, on n'a pas moins de valeur humaine pour ça, mais il est néanmoins évident que nous évoluons dans des sphères très différentes, Anette la caissière et moi. Nous avons des ambitions et des désirs différents dans la vie. Elle choisit de rester à l'horizontal devant une télé en mangeant des chips après son travail. Je choisis de lire des articles où Theodor Adorno procède à des lectures déconstructivistes d'Hegel ou dans lesquels Roland Barthes analyse l'écran cratylique dans les noms propres. Cependant, en dépit de ces différences; nous avons fait un enfant ensemble. Nous avons une fois, il y a longtemps, été à ce point attirés l'un vers l'autre que nous nous sommes laissés aller.
Après l'arrivée de Lotte :
Au lieu de se remémorer sa propre enfance et ses propres souvenirs, il s'parçut, à sa grande surprise, qu'autre chose était en train de se produire. Assis là, dans le siège rouge, il s'étonnait un peu que sa fille lui manque ainsi et c'était comme s'il devenait son propre père. C'était son père, et d'une manière tout à fait remarquable tous les autres pères, qui s'invitaient dans son trip mémoriel ; c'était dans leur monde, fait de leurs expériences et de leurs sentiments, qu'il était convié - contre son gré ; et non dans celui des enfants, le sien quand il était jeune ou celui de Charlotte Isabel. Il se sentit les tempes glacées lorsqu'il réalisa soudain qu'il était incapable de se rappeler sa propre vie et qu'au contraire il lui semblait pénétrer à l'intérieur de la tête de son père, dans le cerveau commun à tous les pères; si soucieux de leurs enfants, si découragés par leurs enfants.
Où est mon enfant ?
Ce livre fait partie de la sélection littérature du Prix des Lecteurs Livre de Poche pour le mois de mars !
Bon, je ne note pas ! :) J'ai reçu samedi Le cercle des huit du LDP, j'espère qu'il me plaira...
RépondreSupprimerBon je vais dire comme Asphodèle moi non plus! Je ne me fie plus au prix des lecteurs, je viens de lire Quand souffle le vent du nord... Bof bof et une anglaise à bicyclette assez maladroit aussi.
RépondreSupprimer@ Asphodèle : J'espère qu'il te plaira plus que "Le front russe"... J'irai lire ta chronique !
RépondreSupprimer@missycornish : Je n'ai pas lu ce livre, mais j'en ai beaucoup entendu parler, en bien comme en mal, et il ne me tente pas vraiment. Il a gagné un prix ? Par contre, pour Charlotte Isabel Hansen, il faisait juste partie de la sélection de mars, donc il n'a pas de prix, et d'ailleurs, il n'a pas été retenu par le jury de lecteurs !