vendredi 17 février 2012

Bifteck de Martin Provost

A Quimper, la boucherie Plomeur fait un tabac. Toutes les dames de la région viennent y faire la queue et pas seulement pour les succulentes viandes que l'on peut y trouver. C'est devant André, le jeune boucher, que ces dames, pauvres ou riches, jeunes ou vieilles, se pâment, en attendant le retour de leurs maris partis à la Grande Guerre. Elles ne souhaitent qu'une chose, se voir attribuer l'araignée, ce morceau de gourmet, qui viendra désigner celle qu'André rejoindra dans l'après-midi. La guerre finie, les maris reviennent. Apparaissent alors devant la porte de la boucherie, un, deux, trois ... puis sept bébés chacun dans un panier en osier. André décide de s'en occuper et, poursuivi par un mari jaloux, de quitter sa chère Bretagne pour l'Amérique.

Ce livre commence un peu comme une fable ou un conte : un jeune boucher, pas très riche, pas très beau, se découvre le don de "faire chanter la chair" des femmes. Même la femme du sous-préfet et la comtesse tombent sous son charme ! Puis, il décide de se consacrer corps et âme à ses sept enfants qui font véritablement partie de lui. J'ai bien aimé l'ambiance qui m'a un peu rappelé ce que j'avais ressenti en lisant Le Livre des nuits de Sylvie Germain. Mais l'ambiance est ici plus "carnivore" : beaucoup (trop ?) de viande, de chair et d'abats.

Le conte devient par la suite fantastique : la fuite d'André et ses enfants les amène sur une île déserte où les arbres donnent de la viande et où l'on se sent sans cesse observé par les deux lunes dans le ciel qui font des clins d'œil... Tout se mélange, réalité et rêve, et devient par là-même un peu confus. On perd tous les repères temporels (les enfants grandissent si vite) et spatiaux (où se trouve cette île ?). J'ai moyennement apprécié la fin du récit bien trop rapide et qui m'a laissé un arrière-goût d'inachevé. L'épilogue, qui fait référence à la gastronomie américaine, m'a peu convaincue. Quelle déception ! Ce court roman pourtant commençait bien, mêlant humour et fantastique dans une Bretagne bien réelle, mais il part à vau-l'eau et devient un peu trop délirant à mon goût.

Extraits : 

André Plomeur est né à Quimper, par un beau jour d'avril. Sa mère finissait de larder un rôti de bœuf quand elle se sentit embrochée comme un poulet prêt à cuire. La cliente qui attendait, la voyant étouffer, crut que c'était le cœur qui lâchait. Mais non. Ça se passait plus bas. Lorsque les eaux murent à ruisseler sur la sciure, on envoya chercher le futur papa aux abattoirs. Il fallait le prévenir dare-dare que l'enfant de l'amour arrivait.

Il paraît que la force d'aimer du tout jeune étalon était telle qu'être aimée une seule fois suffisait pour qu'on eût l'impression d'être aimée pour toujours. Cela signifie-t-il qu'atteindre le point culminant du plaisir annule à jamais tout besoin de plaisir ? Les duchesses arrivées au ciel n'en redescendaient pas de sitôt; et nombreuses furent celles qui, après cette expérience unique, partirent en retraite chez les moines de Landévennec, e, presqu'île de Crozon, et finirent par y prendre le voile.

Ce livre fait partie de la sélection de février pour le Prix des Lecteurs-Livre de Poche 2012.


5 commentaires:

  1. Je pense que je vais quand même me laisser tenter. je suis intriguée, j'ai vu des avis très différents.

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  2. J'ai tellement aimé le côté déjanté !!!

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  3. J'ai beaucoup aimé les 40 premières pages et c'est tout

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  4. Je suis en train de le lire. il y a pour l'instant des choses qui m'ont beaucoup plu mais par contre je n'en suis qu'à la soixantième page.

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  5. @ Zazy : Un peu trop pour moi ! Le début est très bon, mais la suite m'a beaucoup moins plu.

    @ Sandrine : Je suis d'accord, je crois que ça correspond à la partie "Bretagne". J'ai moins aimé le reste (bateau + île).

    @ Anis : J'espère que tu aimeras jusqu'au bout !

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