mardi 13 mars 2012

Le Club des incorrigibles optimistes de Jean-Michel Guenassia

19 avril 1980. C'est l'enterrement de Sartre. Michel Marini retrouve un de ses anciens amis perdus de vue, et rencontré à la fin des années cinquante, alors qu'il avait douze ans, qu'il était une terreur au baby et fan de rock n'roll. Il fréquentait alors le Balto, un bistro parisien, qui abritait un bien étrange club de joueurs d'échecs, tous  des russes, polonais, hongrois ou roumains ayant fui leurs pays. C'est un roman d'adolescence qu'a écrit Jean-Michel Guénassia, sur fond trouble de guerre d'Algérie et de Russie stalinienne.

Difficile de résumer un roman (un pavé) si dense tant il y a de personnages et d'histoires qui s'entremêlent ! Le héros principal, c'est bien sûr Michel Marini, cet adolescent qui passe son temps à lire, même en marchant, à jouer au baby puis aux échecs, et qui grandit dans une famille compliquée, à la fois "catho" (côté mère) et "coco" (côté père), et qui s'entre-déchire. Heureusement, ses amis réfugiés de l'Est, l'aident à surmonter les dures épreuves de l'adolescence : premières amours, conflits familiaux, le lycée et le bac...

Les autres héros, ce sont donc Igor, Sacha, Imré, Leonid et autres, ces réfugiés soviétiques dont Jean-Michel Guenassia dresse le portrait. C'est à chaque fois l'occasion d'un retour en arrière : comment ce médecin ou ce pilote de l'air héros de la guerre dans leur pays, se sont-il retrouvés pauvres et chauffeurs de taxis à Paris ? Pour quelles raisons sont-il passés à l'ouest, abandonnant femme et enfants, mère et proches, sans espoir de les revoir ? Le rideau de fer est construit, on est en pleine guerre froide, et tous ces réfugiés, ceux qui défendent le communisme et Staline et ceux qui le dénoncent, se retrouvent au Balto, pour former le plus improbable club d'échecs parisiens.

Véritable fresque sociale et historique, Jean-Michel Guenassia, nous plonge dans le Paris populaire des années 60 et on suit le jeune Michel Marini, ses doutes et ses premiers émois, avec un agréable plaisir, qui démarre doucement, mais se propage tout au long de la lecture. Je suis enchantée de cette lecture, de ces personnages attachants et de leurs histoires, qui font que j'ai eu du mal à lâcher ce roman, une fois bien dedans. 

Extrait :

A la bibliothèque de la mairie, en face du Panthéon, les bibliothécaires restaient dubitatives quand je leur ramenais les cinq livres auxquels on avait droit si peu de temps après les avoir pris. Elles me fixaient d'un air suspicieux. Je m'en fichais et continuais à m'occuper de mon auteur du moment en terminant son étagère avec détermination. J'ai dévoré les classiques avec des critères littéraires personnels. Je ne lisais pas un romancier. Je lisais sa biographie et je n'arrivais pas à aimer l'œuvre si je n'aimais pas l'homme. L'homme était plus important que l’œuvre. Quand la vie était héroïque ou illustre, les romans étaient meilleurs. Quand le bonhomme était abominable ou médiocre, ça avait du mal à passer. Saint-Exupéry, Zola et Lermontov ont longtemps été mes auteurs préférés, pas seulement pour leurs œuvres. J'aimais Rimbaud pour sa vie fulgurante et Kafka pour sa vie discrète et anonyme. Comment réagir quand vous aimez Jules Verne, Maupassant et Dostoïevski, Flaubert, Simenon et une flopée d'autres qui se révélaient d'abominables salauds ? Devais-je les oublier, les ignorer et ne plus les lire ? Faire comme s'ils n'existaient pas alors que leurs romans n'attendaient que moi ? Comment pouvaient-ils avoir écrit des œuvres exceptionnelles en étant des êtres aussi répugnants ?

Ce livre fait partie de la sélection littérature du mois de mars pour le Prix des Lecteurs - Livre de Poche et a déjà reçu le Prix Goncourt de lycéens en 2009.


6 commentaires:

  1. J'ai adoré! Un très bon moement de lecture. J'avoue que les prix goncourt des lycéens accrichent bien chez moi. Abordables, bien écrits, intéressants...

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  2. J'ai beaucoup aimé également, je l'avais lu pour le prix des lectrices Terrafemina.

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  3. je suis dépitée en lisant ce livre, au bout de 130 pages je n'en peux plus de longueurs et platitudes. Je me sens gavée au bout de 20 pages.......Je ne pense pas parvenir à continuer longtemps comme ça
    Et le pire, c'est que c'est la même chose avec les 2 autres livres

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  4. @ Hélène et Anis : Décidément ce livre a été sélectionné pour pas mal de prix !

    Oh mince Mimi, décidément tu n'as pas de chance avec cette sélection. Mais on est seulement au début, tu auras sûrement des coups de cœur plus tard !
    Si ça peut t'aider à le finir, la deuxième moitié du livre est plus captivante que la première !

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  5. Ce livre est resté des mois sur ma WL et il est dans ma PAL depuis un petit temps maintenant, je dois absolument le lire ! Le titre est génial, le résumé m'attire vraiment et en bonne fan de Sartre j'aime cette petite référence qui est plutôt prometteuse :)
    A part ça, je suis définitivement fan de tes chroniques !
    Belle journée à toi.

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    1. C'est très gentil de ta part ! J'ai trouvé quelques longueurs au début du roman mais franchement, une fois dedans, je l'ai dévoré pour connaître les histoires des nombreux personnages.

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