samedi 11 août 2012

Rêves oubliés de Léonor de Récondo

Aïta, Ama et leurs trois enfants vivent heureux en Espagne jusqu'à ce que Franco arrive au pouvoir. Contraints de fuir leur pays, ils partent habiter en France avec les parents d'Ama et ses deux frères activistes. Ils doivent apprendre à vivre dans un pays qui n'est pas le leur, entre les menaces franquistes qui ne sont jamais loin et la Seconde Guerre Mondiale qui approche... Mais, être ensemble, c'est tout ce qui compte.

Rêves oubliés est un court mais intense roman sur l'exil. Chapitre par chapitre, on suit le point de vue de chaque personnage, des parents aux enfants en passant par les oncles. On suit leur déchirement à l'idée de quitter leur pays, leur adaptation à leur nouvelle vie, leurs regrets du temps d'avant, leurs souvenirs qui s'effacent, les humiliations qu'ils subissent car ils sont à jamais des étrangers... Mais, là où Léonor de Récondo a excellé, c'est que tout est raconté sans jamais tomber dans un pathos inutile : les personnages sont forts, courageux et se forcent à oublier leurs rêves, leur passé, pour vivre leur nouvelle vie sans tomber dans la tragédie. Car ce qui importe, c'est qu'ils soient ensemble et leur véritable force est leur famille.

C'est le personnage d'Ama, la mère, qui ressort brillamment du roman. En effet, entre les chapitres, s'insère son journal, écrit dans un petit carnet à partir de leur départ d'Espagne. Elle y consigne ses sentiments, ses émotions, son amour pour Aïta et ses enfants, et aussi les épreuves difficiles et terribles qu'elle subit entre l'envoi de ses frères dans un camp espagnol et la violence des Allemands. Le tout avec beaucoup de pudeur et une écriture poétique (il y a même des haïkus parsemés dans le roman) qui touche intensément le lecteur.

Rêves oubliés est un magnifique roman que j'ai dévoré du début à la fin sans pouvoir m'arrêter. Léonor de Récondo, que je ne connaissais pas, est une violoniste virtuose et Rêves oubliés est son deuxième roman. Reste plus qu'à me procurer, La Grâce du cyprès blanc, son premier roman.

Ce livre fait partie de la sélection pour le prix Océans organisé par France Ô et Babelio.

lundi 6 août 2012

Malta Hanina de Daniel Rondeau

Malta Hanina n'est pas un roman au sens typique du terme, c'est-à-dire qui raconte une histoire, avec un début et une fin. Malta Hanina est bien plus. Sur la demande de Bernard Kouchner, alors ministre des affaires étrangères, Daniel Rondeau devient ambassadeur de France sur l'île de Malte. Son livre est le résultat de plusieurs années passées sur l'île où il a vu « tourner les saisons, et fleurir trois fois les orangers ».
 
Malta Hanina est un journal, dans lequel il note les rencontres avec les habitants de l'île qui lui racontent leur Malte. C'est aussi un recueil d'anecdotes historiques sur Malte : des chevaliers de l'ordre de Malte à Napoléon qui a conquis l'île en passant par l'esclavage et les langues parlées, Daniel Rondeau évoque les événements et les personnages qui ont marqué Malte. On voit tout de suite que l'auteur s'est beaucoup documenté sur l'île, à la fois par des lectures (voir la bibliographie à la fin du texte) et par les érudits et historiens qu'il a rencontrés.

Daniel Rondeau a écrit une belle ode à Malte la généreuse (Malta Hanina), à Malte la multiple, à la fois catholique, musulmane et juive, à la fois paradisiaque et sujette aux plus violentes tempêtes. J'ai beaucoup apprécié la lecture de ce texte car Daniel Rondeau parvient à nous faire ressentir, par le choix de ses mots et la qualité de son écriture, l'atmosphère particulière de l'île, une atmosphère chaude, isolée, colorée, et l'on parvient presque à sentir le parfum des fleurs et des fruits. C'est un très beau livre qui donne envie de voyager à Malte bien sûr, mais aussi partout ailleurs. 

Ce livre fait partie de la sélection du Prix Océans.

vendredi 3 août 2012

Les racines du yucca de Koulsy Lamko

Un écrivain africain se découvre une allergie au papier. Sur les conseils de son docteur, il quitte Mexico et se retrouve dans un village du Yucatán. Il y rencontre des rescapés de la guerre du Guatemala, dont Teresa, auteur d'un journal de guerre. Fasciné par ces écrits, l'écrivain va aider Teresa à construire son récit. En même temps, l'idée d'un roman lui vient à l'esprit...

Le roman aborde des thèmes difficiles comme le génocide, l'exil, la perte des racines, tout en conservant une pointe d'humour qui allège le récit. En effet, le narrateur rencontre des personnages hauts en couleurs qui peuplent le récit et y vont de leur petite histoire. En même temps, l'écrivain essaie de vaincre son allergie au papier et lui vient l'idée d'écrire un roman sur Léa, une de ses connaissances, devenue concubine du meurtrier de son père et de son époux. Il y a donc plusieurs bouts d'histoire qui se croisent : celle de l'écrivain, celle de Léa, celle de Teresa...

J'ai bien aimé les réflexions de l'auteur sur l'oralité de la littérature africaine et sur l'importance de la langue maternelle, notamment pour des exilés. Koulsy Lamko lui-même a quitté son pays natal, le Tchad, pendant la guerre civile, et a habité de nombreux pays. Mais j'ai été rapidement lassée par l'écriture de l'auteur qui se perd parfois dans des délires poétiques. Je regrette un manque de construction, voulu par l'auteur, qui ont rendu ce roman déroutant. Je n'ai pas accroché, à tel point que je ne suis pas parvenir à lire Les racines du Yucca jusqu'au bout, roman sûrement pas fait pour moi. 

Ce livre fait partie de la sélection du Prix Océans