Il y a la Méditerranée, la lumière, l'île d'Elbe au loin. Mais ce n'est pas un lieu de vacances. C'est une terre sur laquelle ont poussé brutalement les usines et les barres de béton. Depuis les balcons uniformes, on a vue sur la mer, sur les jeux des enfants qui ont fait de la plage leur cour de récréation. La plage, une scène idéale pour la jeunesse de Piombino. Entre drague et petites combines, les garçons se rêvent en chefs de bandes, les filles en starlette de la télévision. De quoi oublier les conditions de travail à l'aciérie, les mères accablées, les pères démissionnaires, le délitement environnant... Anna et Francesca, bientôt quatorze ans, sont les souveraines de ce royaume cabossé. Ensemble, elles jouent de leur éclatante beauté, rêvent d'évasion et parient sur leur amitié inconditionnelle pour s'emparer de l'avenir.
C'est une jeunesse bien triste que nous raconte Silvia Avallone dans ce roman. Une jeunesse piégée dans une banlieue grise aussi vétuste et insalubre que l'on imagine. Cette jeunesse n'a comme loisir que la plage, très sale, d'à côté et le bar pour traîner la journée. La nuit, ceux qui ont une voiture vont jusqu'aux discothèques du coin, où règnent alcool, drogues et prostitution. Leur avenir professionnel se trouve dans leur environnement immédiat : la Lucchini, l'acierie de Piombino. A travers le personnage d'Alessio, frère d'Anna, Silvia Avallone nous décrit le dur et harassant labeur des ouvriers de l'usine qui sont comme dévorés par cet acier vivant et tueur.
Anna et Francesca, de très belles jeunes filles de "treize-ans-presque-quatorze", ne passent pas inaperçues dans ce monde brutal. Encore pures et innocentes, leur forte amitié amoureuse les aide à tenir le coup face à un environnement familial instable - pères absent ou violent, mères passive ou impuissante - et face à leurs faibles perspectives d'avenir. Mais elles se soutiennent, s'aiment et rien d'autre ne compte à part elles, jusqu'à ce que leur vie les rattrape...
Entre roman social et roman d'apprentissage, D'acier offre une image bien pessimiste de l'Italie. C'est un roman très réaliste, âpre et parfois dérangeant, mais qui donne aussi un peu d'espoir à travers la description d'une amitié plus forte que tout.
Merci pour cette chronique, je vais en parler à ma collègue qui cherchait justement un peu de littérature italienne
RépondreSupprimerMerci Poulette ! C'est son premier roman, mais il a reçu plusieurs prix. Il faut que je lise son dernier Marina Bellezza.
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