lundi 4 novembre 2013

Sauf les fleurs de Nicolas Clément

Marthe, 12 ans, vit avec ses parents et son frère Léonce dans une ferme, certes petite, mais qui lui convient très bien. Malheureusement, le père est violent et frappe leur mère sans retenue. Marthe trouve une échappatoire dans l'amour de sa mère et de son petit frère et dans l'amour des mots qu'elle apprend à l'école. A seize ans, elle rencontre Florent, qui lui fait découvrir que les hommes ne sont pas tous violents. Un drame survient et Marthe doit y faire face, avec toutes ses blessures et ses cassures.

Je voulais une mère avec des épaules pour poser mes joues brûlantes. Je voulais un père avec une voix pour m'interdire de faire des grimaces à table. Je voulais un chien avec un passé de chat pour ne pas oublier qui j'étais. Je voulais un professeur pour me surprendre. Je voulais des livres pour construire une cabane à la cime des arbres. Je voulais être un homme pour sentir ce que ça fait d'être une histoire. Je n'ai pas eu tout ce que je voulais mais je suis là, avec mes zéros, ma vie soldée du jour qui vaut bien ma vie absente d'avant. Je tombe rond ; mon compte est bon.

Écrit à la première personne, ce court et saisissant roman se dévore tout seul. L'histoire de cette enfant qui tente de grandir et de se construire, malgré la violence du père et l'impuissance de la mère, ne peut qu'émouvoir. La force du roman est magnifiquement portée par l'écriture poétique et musicale, tout en nuances et en images. Si j'ai trouvé parfois certaines tournures justement trop imagées, trop abstraites, je les ai vite oubliées en me laissant porter par la voix de cette enfant, devenue femme, mais à jamais marquée par la violence. On suit l'évolution de Marthe jusqu'à ses vingts ans, et on la voit chercher du courage et l'espoir d'être guérie dans l'étude du Grec, les livres, et son son désir de devenir enseignante.

En quittant le cours de Monsieur Scott, je longe une école de quartier pour voir les enfants apprendre et l'institutrice les surprendre, magicienne en questions. Il me semble alors que le savoir peut guérir. Que lire, écrire, traduire, c'est reformer le sein, étaler l'origine, aérer le fumier d'où sortiront les fleurs derrière chaque tort redressé. Il en va de cette colonne ancienne comme des chevreaux qui naissent : sitôt à terre, déchiffrer, l'échine aveugle, le pacte encore tendre. Il me tarde d'avoir des élèves et de faire leurs preuves.

Nicolas Clément écrit un premier roman bouleversant sur la violence conjugale et les conséquences sur les enfants. Auteur à lire et à suivre !

Roman publié en septembre 2013 chez Buchet-Chastel, 9 euros, 76 pages.

6 commentaires:

  1. Je le note précieusement pour un futur achat à la bibli, merci

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    1. De rien ! Au moins vous pouvez acheter plein de littérature contemporaine vous !!

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  2. Empruné samedi à la bibli mais pas encore lu, j'ai hâte

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    1. J'irai voir ton avis sur le blog, j'espère qu'il te plaira !

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  3. Quel joli texte en effet! La poésie de Nicolas Clément vaut vraiment le détour. Un coup de coeur de cette rentrée pour moi aussi :)
    Célestine

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    1. Ah je ne suis pas la seule, tant mieux, ce livre vaut vraiment la peine qu'on en parle !

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